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Recours à un prête-nom en vue de l'obtention d'un prêt : manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie et d'une faute civile ouvrant droit à réparation des établissements prêteurs

Pénal - Droit pénal spécial
18/05/2016
​Le fait de recourir à un prête-nom pour obtenir un prêt sur la base d'un dossier contenant des documents falsifiés est constitutif de manoeuvres frauduleuses susceptibles d'établir une faute civile ouvrant droit à la réparation des préjudices des parties civiles.
Telle est la solution d'un arrêt rendu le 4 mai 2016 par la chambre criminelle de la Cour de cassation

En l'espèce, suite à la liquidation judiciaire de la société X, une enquête a été diligentée sur les activités de sa dirigeante, Mme Z. Il résulte des investigations qu'en 2008 et en 2011, sur la demande de celle-ci, qui reconnaît être à l'origine de l'opération, M. B. a accepté d'être son prête-nom pour l'acquisition de deux immeubles, financée à l'aide de deux prêts bancaires d'un montant total de 465 000 euros, excédant largement les capacités financières de l'emprunteur, sollicités auprès des parties civiles sur la base d'un dossier contenant des bulletins de salaires et l'avis d'imposition remis par M. B. à Mme Z, qui se sont révélés avoir été falsifiés. Les mensualités des prêts ont été réglées par les sociétés X et Y et l'association M. créées par Mme Z qui en était la dirigeante de fait et qui occupait l'un des immeubles avec sa famille, tandis qu'elle louait les appartements du second. Mme Z a été poursuivie devant le tribunal correctionnel pour avoir, notamment, par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en présentant des documents falsifiés, trompé les établissements prêteurs en les déterminant respectivement à octroyer deux prêts de 240 000 et 225 000 euros.

En première instance, elle a été condamnée de ce chef. Pour dire non constitué le délit d'escroquerie et déclarer irrecevables les constitutions de partie civile des établissements bancaires, la cour d'appel a relevé que, d'une part, les fonds provenant des prêts ne lui avaient pas été remis, et d'autre part, que la cession d'un immeuble convenue sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entrait pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 du Code pénal. À tort selon la chambre criminelle qui casse l'arrêt sur ce point, en énonçant la solution précitée et rappelant que l'article 313-1 n'exige pas que cette remise soit opérée dans les mains de l'auteur du délit. Selon elle, le délit était constitué du seul fait des manoeuvres frauduleuses employées pour obtenir le financement escompté 
Source : Actualités du droit