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Destinataire de la lettre de contestation de la créance d'un établissement public à caractère administratif

Affaires - Commercial
11/01/2018
L'envoi de la lettre de contestation par le liquidateur au siège d'un établissement public à caractère administratif, qui a la qualité de créancier, vaut avis à celui-ci de l'existence de la contestation au sens de l'article R. 624-1, alinéa 2, du Code de commerce, peu important que la lettre n'eût pas été adressée personnellement à l'agent comptable, seul compétent pour déclarer les créances de l'établissement public. 
Tel est l'enseignement d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 10 janvier 2018. En l'espèce, une société (le débiteur) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 26 juillet et 11 septembre 2012. L'agent comptable de l'Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (l'Oppic), établissement public à caractère administratif, a déclaré une créance qui a été contestée par le liquidateur. Conformément à la proposition de ce dernier, le juge-commissaire a rejeté la créance, faute de réponse du créancier dans le délai de trente jours à la lettre de contestation. L'Oppic, agissant par son agent comptable, a formé un recours contre cette ordonnance, en faisant valoir que ni le délai d'appel contre l'ordonnance du juge-commissaire, ni celui pour répondre à la contestation n'avaient couru, au motif que cette ordonnance et la lettre de contestation n'avaient pas été "notifiées" à son agent comptable, seul compétent pour déclarer les créances.

La cour d'appel (CA Versailles, 19 mai 2016, n° 14/01101) juge l'Oppic recevable à contester la proposition de rejet de sa créance formulée par le mandataire judiciaire. Elle constate, à cet effet, que le liquidateur a adressé sa lettre de contestation à l'Oppic, et non à l'agent comptable de celui-ci pourtant seul habilité à agir en matière de déclaration de créance. Dès lors, elle en déduit qu'un tel envoi de la lettre de contestation, irrégulier, n'a pas fait courir le délai de trente jours prévu par l'article L. 622-27 du Code de commerce pour contester la proposition du mandataire judiciaire.

Enonçant la solution précitée, la Cour de cassation censure l'arrêt d'appel au visa des articles 665 et 692 du Code de procédure civile, ensemble les articles L. 622-27, L. 624-3 et R. 624-1 du Code de commerce. Cette solution s'inscrit dans la jurisprudence de la Cour de cassation qui a déjà jugé que, lorsqu'un créancier déclare sa créance par l'intermédiaire d'un mandataire (en l'occurrence un avocat), la lettre par laquelle le mandataire judiciaire avise que la créance déclarée fait l'objet d'une contestation peut être uniquement adressée au créancier, cet envoi faisant alors courir le délai de réponse de 30 jours (Cass. com., 19 déc. 2006, n° 05-19.115, P+B).

Par Vincent Téchené
Source : Actualités du droit