Retour aux articles

Modification du fondement d’une saisie pénale : la chambre de l’instruction doit ordonner elle-même la saisie de patrimoine

Pénal - Procédure pénale
28/05/2018
Dans un arrêt rendu le 16 mai 2018, la chambre criminelle de la Cour de cassation affirme que, lorsque le fondement d’une saisie pénale est modifié, la chambre de l’instruction est dans l'obligation d'ordonner elle-même la saisie de patrimoine.
Aux termes de l’alinéa 1 de l’article 706-148 du Code de procédure pénale, dans sa version en vigueur, issue de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, si l'enquête porte sur une infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement, le JLD peut, sur requête du procureur de la République, ordonner par décision motivée la saisie des biens dont la confiscation est prévue en application de l’article 131-21, alinéa 5 ou 6, du Code pénal lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit prévoit la confiscation des biens du condamné ou lorsque l'origine de ces biens ne peut être établie.

Il se déduit de ce texte que la chambre de l’instruction, saisie d’un appel formé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé, sur requête du procureur de la République, la saisie en valeur de biens, peut, en raison de l’effet dévolutif de l’appel, et après débat contradictoire, modifier le fondement légal de la saisie de ces biens dès lors que cette mesure a été précédée d’une requête du ministère public, peu important le fondement visé par celle-ci, et doit, s’il s’agit d’une saisie de patrimoine, l’ordonner elle-même.

Après substitution d’une saisie de patrimoine à une saisie valeur, elle doit donc ordonner elle-même la saisie et ne peut se contenter de confirmer une autorisation de saisir. Telle est la solution énoncée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 16 mai 2018.

Confirmation de l'autorisation de saisir et ordonnance de la saisie

Dans cette affaire, au cours d'une enquête préliminaire ouverte après une plainte de l'administration fiscale pour des faits de fraude fiscale, blanchiment, abus de biens sociaux et travail dissimulé mettant en cause M. X, le juge des libertés et de la détention a, sur requête du procureur de la République formulée en ce sens, au visa des articles 131-21, alinéa 9, du Code pénal, 706-141-1, 706-153 et 706-155, alinéa 2 du Code de procédure pénale, autorisé la saisie pénale d’une créance figurant sur un contrat d’assurance à concurrence de la somme de 388 516 euros. M. X a interjeté appel.

La chambre de l’instruction a ordonné le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure et invité les parties à présenter des observations sur l’éventuelle modification d’office du fondement de la saisie en faisant application de l’article 131-21, alinéa 6, aux motifs que M. X était impliqué dans des faits de blanchiment qui lui font encourir, au titre de l’article 324-7, 12°, du Code pénal, la confiscation de tout ou partie de son patrimoine.

Après substitution d’une saisie de patrimoine à une saisie en valeur, la chambre de l’instruction a confirmé l’ordonnance du JLD. La Haute juridiction énonce cependant que la chambre de l’instruction devait non seulement confirmer une autorisation de saison, mais également ordonner elle-même la saisie du patrimoine. La chambre ayant ainsi méconnu le texte susvisé, la Cour de cassation censure l'arrêt.

Par June Perot
Source : Actualités du droit