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Propos imputant à un élu d’avoir des tendances pédophiles constitutifs d’une atteinte à son honneur et sa considération fondée sur la diffamation publique

Affaires - Immatériel
Pénal - Droit pénal spécial
09/05/2019
La Cour de cassation confirme dans une décision du 9 avril 2019 l’arrêt d’appel qui a constaté l'existence d'une faute civile à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite en qualifiant de diffamatoires les propos incriminés.
Un conseiller municipal de la ville d’Hénin-Beaumont, membre de l’opposition, a mis en ligne sur son blog un article dénonçant le caractère démagogique de la communication du maire Front national de cette ville, en illustrant spécialement son propos par le fait que celui-ci, lors de festivités organisées dans cette commune, a pris la pose en maillot de bain dans une piscine, entouré d'enfants.

Le maire a fait citer l’auteur de cet article devant le tribunal correctionnel pour diffamation publique envers une personne titulaire d'un mandat public.

Pour constater l'existence d'une faute civile à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite en qualifiant de diffamatoires les propos selon lesquels la « présence d'un homme photographié dans l'eau avec des mineurs est déjà très limite », l'arrêt d’appel a relevé que le passage en cause, qui utilise le terme « homme » plutôt que celui d'élu ou de maire, de « mineurs » et l'expression « est déjà très limite » en caractère gras, insinue que la partie civile a des tendances pédophiles, ce qui constitue l'imputation d'un fait attentatoire à son honneur et sa considération.

Il a ajouté que le plaignant est visé comme adulte, en opposition aux mineurs qui se baignent avec lui, et, par conséquent, en qualité de particulier, ni ses fonctions ni son rôle de maire n'étant évoqués dans ces propos.

Ledit arrêt est confirmé par la Cour de cassation au motif suivant : « faisant une exacte appréciation du sens et de la portée des propos litigieux qui imputent à la partie civile, par voie d'insinuation, le fait suffisamment précis d'avoir des tendances pédophiles, dangereuses pour les mineurs, pour être, sans difficulté, l'objet d'une preuve et d'un débat contradictoire, et dès lors que l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881 n'incrimine les diffamations dirigées contre les personnes revêtues des qualités qu'il énonce que lorsque ces diffamations, qui doivent s'apprécier non d'après le mobile qui les a inspirées ou le but recherché par leur auteur, mais d'après la nature du fait sur lequel elles portent, contiennent la critique d'actes de la fonction ou d'abus de la fonction, ou encore que la qualité ou la fonction de la personne visée a été soit le moyen d'accomplir le fait imputé, soit son support nécessaire, la cour d'appel a justifié sa décision ».

Le présent arrêt peut être utilement rapproché des deux autres décisions (Cass. crim., 9 avr. 2019, n° 18-83615 et Cass. crim., 9 avr. 2019, n° 16-82.610 ; voir Revue Lamy Droit de l'immatériel 2019/159, n° 5393 et n° 5394, à paraître).
Source : Actualités du droit