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CIR : sous-traitance en cascade – mise en place d’un dispositif anti-abus

Affaires - Fiscalité des entreprises
10/01/2020
Les modalités de prise en compte des opérations confiées à des organismes sous-traitants au titre du CIR sont aménagées, afin de limiter l’optimisation de la sous-traitance en cascade.

Peuvent être prise en compte dans la base de calcul du crédit d’impôt recherche (CIR) les dépenses de R&D confiées à des sous-traitants, qu’il s’agisse :
– d’organismes de recherche publics, tels que des établissements d’enseignement supérieur délivrant un diplôme conférant un grade de master, des fondations de coopération scientifiques, des établissements publics de coopération scientifique, des fondations reconnues d’utilité publique du secteur de la recherche, des associations ayant pour fondateur et membre un organisme de recherche public ou un établissement d’enseignement supérieur, ou des sociétés de capitaux dont le capital ou les droits de vote sont détenus pour plus de 50 % par un organisme de recherche public ou un établissement d’enseignement supérieur, des instituts techniques, des communautés d’universités et établissements et enfin des stations ou fermes expérimentales dans le secteur de la recherche scientifique et technique agricole (CGI, art. 244 quater B, II-d) ;
– ou d’organismes de recherche privés ou des experts scientifiques ou techniques, à condition que ces organismes ou ces experts soient agréés par le ministre chargé de la recherche (CGI, art. 244 quater B, II-d bis).

La prise en compte des dépenses externalisées par le donneur d’ordre dépend du type de prestataire et de ses éventuels liens de dépendance avec le donneur d’ordre. Ainsi, les dépenses de recherche confiées à des organismes privés ne sont retenues que dans la limite de trois fois le montant total des autres dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d’impôt.

Par ailleurs, s’il n’existe pas de lien de dépendance entre l’entreprise qui bénéficie du crédit d’impôt et le sous-traitant :
– les dépenses de recherche confiées à des organismes publics sont retenues pour le double de leur montant ;
– l’ensemble des dépenses de recherche externalisées (auprès d’organismes publics ou privés) ne sont prises
en compte que dans la limite de 10 M€ par entreprise et par an. Ce plafond est majoré de 2 M€ pour les dépenses
confiées à certains organismes publics (CGI, art. 244 quater B, II-d ter).

À l’inverse, s’il existe un lien de dépendance, ce plafond est ramené à 2 M€ par entreprise et par an.

Le montant des dépenses qui excède ces plafonds ne peut être pris en compte dans l’assiette du CIR de l’entreprise qui confie la réalisation d’opérations de recherche à un organisme de recherche.

Enfin, les sommes reçues par les organismes ou experts publics ou privés sont déduites pour le calcul du crédit d’impôt qui leur est propre, afin d’éviter qu’une même catégorie de dépenses de recherche ne soit prise en compte à deux reprises (CGI, art. 244 quater B, III).

L’article 132 de la loi de finances pour 2020 aménage les modalités de prise en compte des opérations confiées à des sous-traitants au titre du CIR.

Désormais, les dépenses liées à des opérations sous-traitées à des organismes (publics ou privés) ne peuvent être prises en compte par le donneur d’ordre qu’à la condition que ces opérations soient réalisées directement par les organismes à qui elles ont été confiées. Toutefois, par dérogation, ces organismes peuvent eux-mêmes recourir aux organismes publics ou privés éligibles, pour la réalisation de certains travaux nécessaires à ces opérations.

Par ailleurs, le doublement d’assiette en cas de sous-traitance publique est désormais limité à la part des dépenses afférentes aux opérations effectivement réalisées par l’organisme public éligible, à l’exclusion des dépenses liées à des opérations que l’organisme public aurait lui-même sous-traitées.

Ces modifications s’appliquent aux dépenses exposées à compter du 1er janvier 2020.
 
COMMENTAIRE

Ces dispositions visent avant tout à lutter contre certaines pratiques abusives constatées par l’administration fiscale
lors des contrôles réalisés sur l’utilisation du CIR.
En effet, dans la mesure où les organismes privés non agréés, qui peuvent constituer des sous-traitants de second
niveau, ne sont pas tenus de déduire de leur propre CIR les sommes facturées, la même dépense fiscale est
parfois prise en compte deux fois dans les cas de sous-traitance en cascade :
– tout d’abord, le donneur d’ordre comptabilise la dépense de sous-traitance au titre du CIR ;
– le sous-traitant doit déduire les sommes reçues du donneur d’ordre pour le calcul de son propre CIR et ne comptabilise donc pas cette dépense au titre du CIR ;
– néanmoins, s’il a lui-même fait appel à un sous-traitant pour réaliser certaines opérations de recherche, ce dernier pourra, s’il s’agit d’un organisme privé non agréé, comptabiliser les sommes facturées pour ces opérations au titre du CIR.
Ces pratiques abusives sont particulièrement préjudiciables dans la mesure où, en détournant le CIR de son objet, elles contribuent à alimenter les critiques récurrentes à l’encontre de ce dispositif par ailleurs vertueux pour l’économie française. Dans un contexte où le coût très élevé du CIR (évalué à 6,5 Mds€ pour 2020) est régulièrement invoqué pour demander sa suppression ou son remaniement, il est nécessaire de garantir sa fiabilité pour ne pas le fragiliser davantage. C’est la raison pour laquelle l’article 130 de la loi de finances pour 2020 prévoit la remise d’un rapport contenant des informations plus précises notamment sur la mise en oeuvre effective des dispositifs relatifs à la sous-traitance d’opérations. 

Pour en savoir plus sur le CIR, voir Le Lamy fiscal, n° 1677 et s.
Source : Actualités du droit